août - 2019 19

Cela fait des années que les bibliothèques publiques entendent parler de troisième ou tiers lieu, l’expression du sociologue Ray Oldenburg qui définit l’endroit où l’on se retrouve après la maison et le travail. Le troisième lieu c’est celui du dehors (ou d’un intérieur externe aux deux premiers), celui de la rencontre, de l’échange et de la socialisation donc, mais aussi des découvertes et des apprentissages informels. Les bibliothèques n’ont jamais été nommées dans la liste que propose Oldenburg. Pourtant elles se sont rapidement et avec raison, senties interpellées  par ce concept.

Ainsi, depuis des années, la bibliothèque publique est à la recherche des éléments qui vont en faire le troisième lieu préféré des citoyen-ne-s. En se concentrant sur ses espaces, ses services (parfois hors les murs il est vrai), ses usager-è-s et tout ce qui se passe à l’intérieur de ses murs, la bibliothèque publique a un peu oublié de s’intéresser à ce qui se passe à l’extérieur. Elle a certes, la plupart du temps, pris soin de son environnement extérieur immédiat, mais rarement s’est-elle éloignée de ses murs pour s’observer dans un contexte plus élargi.

Dans le cadre des projets de nouvelles bibliothèques, le tissu urbain dans lequel elles s’implantent est analysé, mais cette analyse vient surtout en appui au choix du lieu, évoquant forces et contraintes. Les relations avec d’autres institutions culturelles ou équipements municipaux sont évoquées, les accès pour y parvenir aussi, les transports en commun, la sécurité des piétons. Il peut être proposé d’élargir le trottoir, d’ajouter un arrêt de bus ou des supports pour vélos. Il peut être mentionné de renforcer des liens entre différents lieux, avec les parcs par exemple, en améliorant la qualité du trajet des piétons et des cyclistes. Ce sont là les voies officielles pour parvenir à la bibliothèque, celles qui ont été tracées et sont entretenues par le service d’urbanisme.

Sonia Lavadinho, anthropologue et géographe urbaine, ne parle pas plus des bibliothèques que Ray Oldenburg, mais elle a élaboré un concept intitulé la deuxième peau des parcs qui s’applique parfaitement aux bibliothèques publiques des villes.

On peut regarder cette vidéo en remplaçant le mot parc par bibliothèque toutes les fois où il est prononcé

La deuxième peau des bibliothèques, c’est ce qui se passe autour d’elles, ce qui mène à elles. Comme les parcs, les bibliothèques sont des endroits qui nous rendent heureux, des lieux différents. Le contact avec les livres et la beauté d’une simple étagère les présentant ont encore ce pouvoir apaisant. La bibliothèque, tout comme le parc, est un refuge dans la ville.

Mais comment est-ce à l’extérieur de la bibliothèque? Est-ce que c’est agréable? Est-ce qu’il s’y passe quelque chose? Qui donne envie de s’arrêter, et peut-être d’entrer dedans.

Comme Sonia Lavadinho le décrit, c’est en créant une épaisseur autour de la bibliothèque que l’on peut induire ces comportements. Il faut que “l’autour” de la bibliothèque, sa première membrane, soit aussi accueillante, invitante, que son intérieur. Il faut que cette membrane devienne habitable.

L’idée du trajet est également très importante dans la deuxième peau. C’est principalement au non utilisateurs-trices que pense l’anthropologue. Ce trajet qui n’est a priori pas à destination du parc ou de la bibliothèque, c’est lui qu’il faut modifier, renforcer. Comment? Sonia Lavadinho propose trois façons de le faire :

  • Offrir la possibilité et le désir de micro séjours, de pauses. Il faut alors imaginer des aménagements, un mobilier urbain qui donne envie de s’arrêter.

  • En renforçant la latéralisation, les opportunités de faire des pas de côté, dit Sonia Lavadinho, invitant la danse dans son concept. Ces pas de côté, ce sont les imprévus, les arrêts qu’on ne pensait pas faire. Ils se concrétisent encore une fois par du mobilier urbain invitant, mais peut-être aussi par une réappropriation de l’espace public, de la rue, du parvis d’une bibliothèque.

  • En renforçant les cordons de sociabilité, les opportunités d’interagir avec d’autres personnes. Il s’agit là d’offrir des lieux provoquant les rencontres naturelles, tout comme dans un parc les parents se retrouvent à discuter entre eux de façon naturelle près des modules de jeux pour enfants.

Finalement cette deuxième peau amène l’idée de constellation, dans laquelle on retrouve les concepts de groupe ou d’ensemble. La bibliothèque ne fonctionne pas de façon autonome, elle est intégrée à un groupe, un ensemble urbain. Sa deuxième peau lui permet de dialoguer avec son environnement et surtout avec celles et ceux qui la traversent et s’y arrêtent.

Tout cela, épaisseur, trajet, latéralisation, constellation, enrichit l’expérience de celles et ceux qui fréquentent la bibliothèque, qui l’utilisent, mais surtout de celles et ceux qui ne l’utilisent pas ou qui n’avaient pas l’intention de la fréquenter, celles et ceux dont on espère que le pas de côté les conduira à l’intérieur.

 

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juil - 2019 09
Image trouvée ici : https://trisomie.qc.ca/a-propos/accessibilite-universelle/

Image trouvée ici 

Sous ces initiales se cachent, non pas les prénoms de deux amoureux ayant convolé, mais plutôt l’implication et les partenariats des Bibliothèques de Montréal et de l’accessibilité universelle.

L’accessibilité universelle, design universel (design for all) ou conception universelle, qu’est-ce que c’est?

Sous ces expressions se cache un même principe : offrir des aménagements ou des services que toutes et tous, sans distinction d’âge, de sexe, de situation ou de handicap, peuvent utiliser.

Les Nations Unies définissent l’accessibilité universelle ainsi : « la conception de produits, d’équipements, de programmes et de services qui puissent être utilisés par tous, dans toute la mesure du possible, sans nécessiter ni adaptation, ni conception spéciale » ( Article 2 de la Convention internationale des Droits des personnes handicapées).

Ainsi on différenciera l’accessibilité simple ou l’adaptation, par exemple construire une rampe à côté d’un escalier pour permettre aux personnes à mobilité réduite d’accéder à un bâtiment, de l’accessibilité universelle où l’on construirait plutôt une entrée de plain pied que toutes et tous sans distinction peuvent emprunter.

À Montréal, l’organisme Société Logique en donne une explication claire et illustrée avec les sept grands principes du design universel.

Le Code de construction du Québec donne les règlements obligatoires à suivre lors de la conception et la construction d’un bâtiment. La Ville de Montréal possède son propre guide d’Accessibilité universelle des bâtiments municipaux, qui dépasse les exigences minimales du Code de construction. Ces normes orientent les nouvelles constructions ou rénovations importantes des Bibliothèques de Montréal, ainsi que les mises à niveau des constructions déjà existantes, lorsque nécessaire.

L’organisme Kéroul a récemment réalisé une évaluation de l’accessibilité des 45 bibliothèques montréalaises (dans le cadre du Fonds dédié en accessibilité universelle du SDIS)  afin de mieux informer les personnes ayant des limitations quant aux détails de l’accessibilité de leur bibliothèque de quartier.

Les principes de l’accessibilité universelle ne concernent pas uniquement les bâtiments, on doit aussi les retrouver dans les services, les équipements, les collections, la signalisation, les espaces particuliers, ainsi que dans la communication (incluant les sites internet) et la médiation, dans l’optique de faire connaître les bibliothèques et d’accueillir au mieux les personnes en situation de handicap, ou encore dans la sensibilisation des publics aux besoins des personnes ayant une limitation.

Plusieurs organismes et ressources peuvent nous guider lors de l’aménagement d’espaces et de services.

Les Bibliothèques de Montréal ont mis en place diverses activités et partenariats avec des organismes spécialisés en accessibilité universelle et plus particulièrement Altergo.

  • Octobre, mois de l’AU dans les Bibliothèques de Montréal a vu le jour en 2012. L’objectif de ce mois est de sensibiliser le grand public aux différents troubles et déficiences et à augmenter la fréquentation de nos bibliothèques par les personnes ayant des limitations. Une programmation de 75 activités reliées aux 5 sens et à la différence est déployée pendant le mois d’octobre. Les organismes de personnes ayant une limitation en profitent pour mettre plusieurs de ces activités à leur programmation et faire ainsi découvrir le plaisir de fréquenter leur bibliothèque à leurs membres.
  • La grande séduction des Bibliothèques de Montréal en accessibilité universelle est un événement qui vise à faire la promotion des services adaptés mais aussi de l’offre de service plus récente des bibliothèques trop souvent méconnue. Ainsi, les organismes et personnes ayant des limitations sont invités à cet événement et il leur est fait la promotion des services et équipements disponibles : livres en gros caractères, livres audios, jeux adaptés, loupes numériques, logiciel d’agrandissement d’écran. Les collections et équipements moins connus tels que le biblio-courrier, les fablabs, la bibliothèque numérique ou encore les vélos-pupitres sont également présentés aux participants à la grande séduction.
  • Marches exploratoires : plusieurs marcheurs ayant une limitation différente déambulent dans une bibliothèque déterminée afin d’exprimer des recommandations quant à ses services
  • Enfin, chaque automne, une formation est déployée par Altergo auprès du personnel afin que chacun soit mieux outillé pour accueillir les personnes ayant une limitation en fonction de leurs spécificités et ainsi mieux les servir.

Voici également une veille qui s’intéresse aux questions que pose l’accessibilité universelle dans nos institutions, qui propose des façons de changer certaines pratiques, d’améliorer certains lieux ou symboles bien connus :

  • The Accessible Icon Project : le symbole international d’accessibilité universelle (le célèbre personnage assis sur sur un fauteuil roulant en blanc sur fond bleu) a été créé en 1968 et on le doit à Susanne Koefoed. En 2009, les américains Brian Glenney et Sara Hendren commencèrent à réfléchir à un symbole plus vivant après que cette dernière en ait vu un différent au MoMA.
  • bibliotheque-inclusives.fr : un site français qui s’adresse aux professionnels des bibliothèques et leur propose des ressources en liens avec l’accueil pour tous. On parle ici de différents handicaps, mais aussi des personnes éloignées des bibliothèques de par leur statut socio-économique, l’emprisonnement, l’illettrisme.
  • Tactile Studio : rendre l’art accessible à tous, c’est ce que fait Tactile Studio en utilisant les principes du Design for All. Ils conçoivent ainsi maquette, signalétique, reproductions à toucher de sculptures, s’adressant premièrement aux personnes avec un handicap visuel, mais qui interpellent finalement tous les publics.
  • Pictos en bibliothèques : un projet qui a vu le jour en Bretagne (France) suite au désir de “de pouvoir utiliser une signalétique adaptée pour les personnes en situation de handicap, notamment pour les personnes en situation de handicap intellectuel, et plus largement pour toutes les personnes en difficulté avec la lecture.” Les pictogrammes issus de ce travail sont accessibles pour les bibliothèques du monde entier, avec ou sans texte.
  • Fablab et handicap : si cette ressources ne s’adresse pas directement aux bibliothèques, elle intéressera tout de même toutes celles qui ont développé un lab dans leur bâtiment. Ce guide aborde entre autres l’empowerment et l’autonomie que les fab labs peuvent générer pour les personnes en situation de handicap, ou bien encore comment ils peuvent participer à changer le regard qui est porté sur eux, ainsi qu’à briser leur isolement.
  • Signes de bibliothèque : ressource française en LSF (langue des signes française), donc différente de la LSQ (langue des signes québécoise), qui en 64 diapositives issues d’un partenariat entre une médiathèque et les élèves sourds d’un lycée français, offre tous les mots et expressions utilisés en bibliothèque : conte, remboursement, science-fiction, réservation, etc. À quand la même chose en LSQ?
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juin - 2019 05
Le grand escalier face au boisé.

Le grand escalier face au boisé.

Jeudi 23 mai, la nouvelle bibliothèque de Pierrefonds, agrandie et embellie, ouvrait ses portes au public. Celui-ci était au rendez-vous, foulant le tapis rouge, impatient, puis saisi  d’admiration devant le nouveau bâtiment signé par la firme Chevalier Morales Architectes.

Fidèles à leur esthétique, le bâtiment est tout en blanc et en vitres. Les visiteurs pénètrent dans un grand hall où les attendent le café d’un côté et le comptoir d’information de l’autre. Les architectes n’ont pas été avares de volumes ; pour preuve, on retrouve, accroché au plafond un anneau qui permet d’accueillir des prestations de cirque. La nouvelle bibliothèque s’anime en rendant la totalité des espaces accessibles et vivants.

Le café est grand, de nombreuses tables et chaises y attendent les visiteurs. À la belle saison, ce mobilier envahit la terrasse extérieure et la cour intérieure qui marque le centre du bâtiment.

Derrière le café, un peu en retrait, se trouve le fab lab. Imprimantes 3D, découpe laser, LEGO Mindstorm y côtoient  d’autres outils électroniques.

Dans son prolongement, ce sont les modules du réseau d’échange, ou “placotteuses”, ces sortes de cocons où l’on s’assoit à deux, face à face, pour discuter, lire, travailler, créant ainsi un espace intime dans l’espace ouvert de la bibliothèque. Un peu plus loin, la salle multifonctionnelle permet de présenter des spectacles, des films, des concerts.

Face à l’escalier monumental  en X, les “pop up shops” présentent la collection audiovisuelle adulte, incluant plusieurs dizaines de vinyles.

Au rez-de-chaussée, les enfants sont à l’honneur, des tout-petits jusqu’à ceux qui frôlent l’adolescence. Les attendent fauteuils, coussins, jouets, tables sérieuses, et bien évidemment une collection très étoffée. Les documentaires y ont été regroupés en grandes thématiques, une organisation que l’on retrouve également dans la collection adulte. Ces thématiques s’inscrivent sur le bout des rayonnages, en couleur cette fois. Dans cet espace ludique autant que de lecture, on trouve au sol les prémices d’un jeu de l’oie grandeur nature qui nous invite au jeu. Une salle d’animation permet d’accueillir des groupes scolaires et d’offrir des activités aux familles. Un escalier en bois à la fois gradin et agora, de format presque miniature annonce celui majestueux qui nous permet de passer à l’étage des adultes.

Ces marches font face à un boisé qui fait croire au visiteur assis qu’il n’est plus tout à fait à l’intérieur de la bibliothèque, mais pas tout à fait dehors. On retrouve cette idée du passage, de la transparence, entre l’extérieur et l’intérieur, comme dans la petite cour du rez-de-chaussée. Le tableau qui s’offre au visiteur changera avec les saisons, apportant dans la bibliothèque la couleur qui s’y fait discrète ou l’hiver, confirmant la blancheur apaisante de la neige.

L’étage est dédié aux adultes, immense, et l’on s’y perdrait presque en déambulant au milieu des rayonnages. La collection de documents est vaste. Romans, documentaires, bandes dessinées, sont offerts en anglais et en français, respectant ainsi le statut unique d’arrondissement bilingue à Montréal.

Deux salles de travail de groupe, une autre consacrée au travail individuel silencieux et une salle de formation sont des espaces studieux qui s’offrent aux visiteurs, ainsi qu’aux employés de la bibliothèque. La salle de généalogie et le salon des périodiques appellent au  calme et à la sérénité, valeurs toujours présentes au sein des bibliothèques troisième lieu.

En se rendant dans l’espace ado, le visiteur passe devant un mur vert, extension du fab lab en médialab, fait pour la vidéo et les effets spéciaux.

Après la salle dédiée aux  jeux vidéo ou de société ou aux murs vitrés, l’espace ado s’offre dans un prolongement créant ainsi une rupture avec le reste de l’espace des adulte. Une petite scène est là, appelant à des représentations spontanées ou plus organisées. D’étranges dômes suspendus, comme des casques audio surdimensionnés, offrent la possibilité d’écouter de la musique en y connectant son téléphone.

Le dernier espace à explorer est la terrasse sur le toit. Spacieuse et équipée de mobilier invitant à y rester, elle offre un regard plongeant sur la petite cour intérieure et le hall de la bibliothèque.

La bibliothèque de Pierrefonds s’inscrit dans cette nouvelle esthétique où ce sont les documents et les visiteurs qui apportent mouvements et couleurs. Les différents espaces s’articulent de manière logique. Les activités vivantes et le bruit au centre et au rez-de-chaussée, les zones calmes et silencieuses dans les profondeurs du bâtiments.

L’impression qui s’en dégage est celle d’une bibliothèque qui répond aux besoins de tous ses usagers, leur offrant de multiples façons de s’asseoir, lire, travailler, déambuler, créer, et finalement, le sentiment de faire partie d’une communauté.

Toutes les photos sont de Lëa-Kim Châteauneuf, CC BY-SA 4.0

juil - 2018 18
Dans le cadre de mon stage de fin de maîtrise en bibliothéconomie, que j’ai réalisé au sein de la division rénovation, agrandissement et construction (RAC) de la Direction des bibliothèques, je me suis intéressée à la mise en valeur des collections.  J’ai voulu  partager, ici, quelques éléments d’un guide d’orientations que j’ai réalisé pour le RAC, ainsi que différents liens et ressources qui m’ont guidée et inspirée tout au long de mon stage.

 

Connaissez-vous le UX en bibliothèque? Le UX (“User Experience”), c’est d’abord tout ce que ressent et perçoit une personne lorsqu’elle utilise un produit ou un service, et dans notre cas, lorsqu’elle utilise la bibliothèque. C’est une approche qui vise à  améliorer l’expérience que vivent les usagers quand ils fréquentent nos lieux. Dans le guide pratique Utile, utilisable, désirable : redessiner les bibliothèques pour leurs utilisateurs” on retrouve une série de méthodes et de techniques pour évaluer et optimiser les « points de contact » en bibliothèque. Les collections font partie de ces « points de contact » et les mettre en valeur contribue à améliorer l’expérience-utilisateur.

La valorisation des collections, c’est quoi?

  • Leur donner de la visibilité

  • Rendre leur présentation attrayante

  • Les caractériser ; leur «donner du sens»

  • Pouvoir connecter les usagers aux ressources
Henk Kosters via flickr  (BY NC-SA 2.0)

Henk Kosters via flickr (BY NC-SA 2.0).

 

Le merchandising en bibliothèque

 Et pourquoi la bibliothèque ne ressemblerait pas un peu plus à une librairie? Vous y avez déjà pensé, me direz-vous! Les librairies utilisent des techniques de merchandising pour favoriser les achats. Pourquoi donc ne pas utiliser ces techniques en bibliothèque pour favoriser les emprunts?

Selon le Larousse, le merchandising est l’«ensemble des techniques assurant la meilleure diffusion commerciale des produits, grâce à une adaptation de ceux-ci, prenant en compte les désirs des acheteurs et différents éléments de stratégie commerciale (emballage, répartition des produits dans les surfaces de vente)». En bibliothèque, le merchandising est donc d’arrimer la présentation et l’offre de ressources aux intérêts et besoins des usagers, ainsi qu’à leurs comportements d’utilisateur (d’emprunteur).

Pour pouvoir s’adapter aux comportements des usagers, il faut d’abord les étudier. Ainsi, pour mieux positionner les collections dans l’espace, il faut avant tout comprendre comment ce dernier est utilisé et perçu par les usagers.

  • Qu’est-ce qui attire l’attention?

  • Qu’est-ce qui passe inaperçu?

  • Comment les usagers repèrent-ils les ressources sur les rayons?

Plusieurs techniques UX pour étudier les usagers sont détaillées dans Utile, utilisable, désirable. On y retrouve, entre autres, des méthodes d’analyse d’opinions (sondages, focus group, etc.) et des méthodes d’analyse de comportements (enquête contextuelle, cartes d’itinéraires, etc.).

Pour rendre les présentations attrayantes, accrocheuses et cohérentes, et pour favoriser les emprunts, les bibliothèques auraient avantage à investir les techniques du merchandising. Comme le font les librairies, les bibliothèques auraient intérêt à aménager des vitrines et multiplier les tables de présentation, pour présenter un maximum de ressources de face. De plus, toutes sortes de techniques peuvent être utilisées pour attirer le regard des usagers vers les présentations. Par exemple, la technique du “color blocking” consiste à jouer avec les contrastes des couvertures et à agencer les couleurs.

Vous voulez vous former au merchandising? L’association des librairies du Québec (ALQ) offre une vidéo formation sur la présentation marchande et l’aménagement d’une aire de vente.

Le réseau de bibliothèques publiques Anythink,de Rangeview au Colorado, sert certainement d’exemple de merchandising en bibliothèque publique. Pour le réseau, la valorisation des collections est l’affaire de tous les employés des bibliothèques qui respectent des règles et des standards de présentation et qui mettent régulièrement à jour des plans de merchandising. Leur guide de “visual merchandising” est disponible en ligne. Le réseau offre aussi une formation au “branding”, au “design” et au marketing.

Investir les zones d’attente

Une technique du merchandising qu’utilise le  monde du commerce de détail est de placer des produits dans les zones d’attente, dans le but de créer une impulsion d’achat. En bibliothèque, nous pourrions adapter cette technique afin de favoriser les emprunts et surtout afin d’inspirer les usagers. Créer une impulsion d’emprunt ne signifie pas d’inciter l’usager à emprunter tout et n’importe quoi. Il s’agit plutôt de proposer à l’usager des ressources qu’il n’avait pas prévues emprunter, mais qui répondent à ses besoins et intérêts. Ainsi, la bibliothèque devrait placer des ressources à des endroits stratégiques suivant le trajet de l’usager, depuis son entrée dans la bibliothèque jusqu’à sa sortie. Suivant cette logique, on retrouverait des ressources à l’auto-prêt, sur les comptoirs d’accueil et d’information, etc.

 

Henk Kosters via flickr  (BY NC-SA 2.0)

Henk Kosters via flickr (BY NC-SA 2.0)

Mixité des collections

Pourquoi séparer les  supports et les formats alors que les regrouper pourrait les mettre en relation et mieux les valoriser? Il ne fait pas de doute que la mixité des supports contribue à faire augmenter la circulation des ressources et favorise les emprunts non prémédités. L’usager, qui est parfois pressé, a la possibilité de trouver, au même endroit, différentes ressources qui l’intéresse.

Les bibliothèques enrichissent de plus en plus leurs collections en prêtant des objets de toutes sortes qui auraient parfois avantage à se mêler à d’autres ressources pour être mieux valorisés, ou encore pour mieux mettre en valeur d’autres ressources.

Exemples de mixité des collections :

  • Cours de langue avec guides de voyage

  • Revues de cuisine avec livres de cuisine

  • Grainothèque avec documents sur l’agriculture et le jardinage

  • Partitions et manuels d’apprentissage (musique) avec les instruments

 

 Section «hoogspanning» (haute tension) de la bibliothèque centrale d’Almere au Pays-Bas  Henk Kosters via flickr  (BY NC-SA 2.0)

Section «hoogspanning» (haute tension) de la bibliothèque centrale d’Almere au Pays-Bas
Henk Kosters via flickr (BY NC-SA 2.0)

 

L’épineuse question de la classification documentaire

Pour être bien honnête, je ne m’étais jamais questionnée quant à la convivialité de la Dewey en bibliothèque publique avant d’effectuer mon stage au RAC. J’ai pourtant constaté, lors de mes recherches, que plusieurs bibliothèques aux États-Unis et en Europe, surtout, avaient fait le choix d’abandonner la Dewey et d’organiser leurs ressources par thématiques.  Pourquoi? Parce que l’organisation par thématiques ou par «centres d’intérêt» serait beaucoup plus intuitive et conviviale pour les usagers. Aussi, parce que beaucoup plus flexible que la Dewey, on pourrait davantage mettre les collections en valeur en organisant les contenus en fonction des besoins et des intérêts des usagers.

Une enquête de 2009 publiée dans le Library journal a montré, entre autres, que 66,3% des usagers sondés trouvaient le système de classification (Dewey) intimidant. Aussi, seulement 7,4% avaient rarement de la difficulté à se retrouver dans les documentaires. La bibliothèque Louise Michel à Paris a fait sensiblement le même constat en sondant les usagers un peu avant son ouverture officielle. Elle a, suite à cela, décidé d’adopter un classement par «centres d’intérêts».

Ainsi, parce qu’il s’y retrouverait plus facilement de par une organisation moins contrôlée et plus naturelle, l’usager ferait davantage de découvertes. Les bibliothèques publiques doivent s’assurer de la «découvrabilité» des collections. Leur rôle n’est plus de tout conserver, mais de faire circuler le plus possible leurs ressources, au bénéfice des usagers. En sortant les ressources de leurs cloisons traditionnelles, la bibliothèque peut mieux caractériser les espaces collection et créer des parcours inspirants, générateurs d’idées et d’inspiration.

J’ai constaté, lors de discussions avec des bibliothécaires, que la question ne faisait pas l’unanimité. Il existe, en effet, des avantages et des inconvénients d’un côté comme de l’autre. Quoi qu’il en soit, il ne faut pas hésiter à se remettre en question, et à questionner nos pratiques. Ce n’est pas parce qu’on fait quelque chose depuis toujours qu’on devrait continuer à le faire.  Il faut s’adapter aux usagers, et pour cela, il faut mieux les connaître et mettre nos connaissances à jour, parce qu’eux aussi changent. Il faut assurément les impliquer dans la conception des services comme dans celle des espaces, car c’est pour eux/elles que les bibliothèques publiques existent.

 

juin - 2017 16

Les bibliothèques de Côte-des-Neiges — Notre-Dame-de-Grâce ont produit un court vidéo promotionnel pour souligner les résultats des bibliothèques de l’arrondissement en 2016, particulièrement suite à l’ouverture de la bibliothèque Benny.

Un beau modèle d’outil de promotion pour le réseau des bibliothèques de Montréal !

juin - 2017 13

Spéciale rumeurs et fausses nouvelles!

Trouvé ici.

Trouvé ici.

On en a beaucoup parlé l’automne et le printemps dernier. Nous suivions des élections présidentielles rocambolesques chez nos voisins du Sud et ceux de l’autre côté de l’Atlantique. La lutte politique se jouait aussi en ligne et les fausses informations ne manquaient pas, d’un côté comme de l’autre.

Avec la masse d’informations créées et diffusées chaque minute sur Internet, il n’est que trop facile d’en glisser de fausses, mensongères ou manipulatrices dans le lot.

Quand on sait que Facebook est le réseau social numéro un des Québécois pour accéder à l’information (source : Cefrio), réseau social sur lequel aussi bien Radio-Canada que nos voisins font des publications, il devient primordial de savoir repérer les fausses informations.

Nous avons donc regroupé pour vous outiller quelques articles (fiables!) récents, publiés par des médias et acteurs du numérique connus et reconnus.

Il existe d’autres outils pour repérer et déjouer les fausses nouvelles et la désinformation (comme hoaxbuster). En connaître un, vous amènera certainement à en découvrir d’autres. Ils peuvent servir de base à des ateliers ou activités en bibliothèques, pour tous types de publics. À vous de les informer sur la désinformation!

mai - 2017 04

Voici l’histoire d’un petit fab lab, petit par la taille, mais grand par sa place dans l’histoire des fab labs en bibliothèque au Québec. En effet, Benny Fab est le premier fab lab à avoir vu le jour dans une bibliothèque publique de la province.

Sur la porte du fab lab. Le ton est donné!

Sur la porte du fab lab. Le ton est donné!

On pourrait presque raconter que Benny Fab est un accident, mais c’est plutôt une heureuse surprise.

Dans le projet de la nouvelle bibliothèque Benny, commencé en 2008, il n’était pas vraiment question de fab lab. Le mot n’avait même pas encore atteint le milieu professionnel à Montréal. À quelques mois de l’ouverture, en 2015, il est pourtant apparu inconcevable que la nouvelle bibliothèque n’offre pas un espace de création numérique à ses usagers.

Un emplacement est trouvé et le petit fab lab s’installe doucement dans cet espace d’une dizaine de mètres carrés. Les débuts sont un peu hésitants, mais aujourd’hui une équipe de deux personnes lui est dédiée, un bibliothécaire, Marc Lemaire, et un animateur spécialisé, Thomas Poulin. À eux deux, ils s’occupent du matériel, des activités, d’accueillir les usagers du fab lab pour leurs projets personnels, ou simplement pour répondre aux questions des curieux. Deux autres employés les aident ponctuellement, Yuan Gao, animatrice spécialisée et Laurence Sabourin aide-bibliothécaire.

On retrouve dans ce mini fab lab trois imprimantes 3D, une découpe vinyle, plusieurs ordinateurs, des LEGO WeDo et Mindstorm (robotique), des Arduino, Littlebits, Makey makey, des appareils photo reflex Canon, un coffre à outils avec tout le matériel du parfait petit bricoleur. Et bien évidemment, la Charte des fab labs.

Quatre clubs ont été créés : électronique, robotique, jeux vidéo, modélisation et impression 3D. Ils se réunissent une fois par mois et compte chacun une douzaine de jeunes. Le lieu ne pouvant de toute évidence pas accueillir un plus grand nombre de participants, Benny Fab déborde de ses murs et investit la salle de formation et l’espace ado voisin.

Benny Fab a été lancé sans une grande planification et avec un budget restreint. Et c’est pourtant un immense succès. Il a très vite été envahi par les usagers.

On y croise monsieur Thibault, 71 ans, qui vient toutes les semaines. Il a découvert le fab lab en passant devant lorsqu’il se promenait dans la bibliothèque. Il fabrique un simulateur de vol et certaines pièces sont introuvables dans le commerce. Il s’est mis à la modélisation 3D pour les créer et les imprime à Benny Fab.

Kyan, Geneviève Lamarche, tous deux utilisateurs de Benny Fab, et Marc Lemaire, bibliothécaire-coordonnateur du fab lab.

Kyan, Geneviève Lamarche, tous deux utilisateurs de Benny Fab, et Marc Lemaire, bibliothécaire-coordonnateur du fab lab.

Geneviève, elle aussi vient depuis la première journée. C’est son fils, Kyan, 6 ans, qui voulait entrer dans le fab lab. Il joue aux LEGO WeDo ou Mindstorm. Elle, elle a découvert un monde et créé le lien avec ses études. « J’ai besoin d’une place comme ça pour mon travail à l’école ». Elle étudie en restauration au Collège LaSalle et s’intéresse à la nourriture pour les enfants, mise en forme style super héros. « Des emporte-pièce en forme d’éclair ou de chauve-souris de Batman, ça n’existe pas! Alors je les imprime ».

Geneviève veut appliquer la technologie à l’alimentation. Elle veut créer un fab food lab pour les enfants : Super Hero Food for Kids!

Elle a d’ailleurs été lauréate des Grands prix de la relève en restauration, tourisme et hôtellerie de l’AQFORTH (Association québécoise de la formation en restauration, tourisme et hôtellerie) et a participé au rendez-vous Maker to Entrepreneurs, une communauté dont les membres se rencontrent régulièrement pour partager leurs projets.

Benny Fab, c’est « open collaboration ! », dit Geneviève.

Un projet a aussi émergé avec la rencontre d’une personne malvoyante. Originaire du Japon, celle-ci possède une canne japonaise avec un embout particulier pour l’aider dans ses déplacements. Cet embout n’existe pas sur la canne qui lui est fournie par le gouvernement du Québec. C’est donc une équipe issue de Benny Fab qui travaillera sur ce petit bout de plastique si important qu’il sera « comme une nouvelle paire d’yeux » pour cette personne.

Benny Fab dans la salle de formation de la bibliothèque.

Benny Fab dans la salle de formation de la bibliothèque.

En marge de ces passionnés et de leur projet au long cours, on croise des ribambelles de jeunes garçons, dont l’âge tourne autour de 10 ans. Ils entrent dans le fab lab comme dans leur chambre, empruntent un ordinateur, un iPad, des LEGO Mindstorm. On les suit dans la salle de formation où ils modélisent dans le bruit, le partage et la bonne humeur, les idées qu’ils ont en tête. Lorsque la modélisation est trop complexe pour être imprimée, Thomas leur propose de la transférer dans Unity, un outil de création de jeu vidéo. Ne reste plus qu’à promener un personnage dans cet univers unique et créé en quelques instants.

Benny Fab c’est tout ça. Des machines bien évidemment, mais qui ne sont que la pointe émergée d’un iceberg de relations humaines.

Pour suivre leurs créations, le compte Thingiverse de Benny Fab : http://www.thingiverse.com/Fab_Lab_Benny/about

Pour les joindre : fablabbenny@gmail.com

Modélisation 3D sur Tinkercad, mangas et BD : un fab lab en bibliothèque!

Modélisation 3D sur Tinkercad, mangas et BD : un fab lab en bibliothèque!

Images : Gaëlle Bergougnoux, licence : CC BY-NC-SA 2.5 CA

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avr - 2017 09

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 nate bolt via Flickr (CC BY-NC 2.0)

Chaque semaine, des professionnel.le.s des bibliothèques de Montréal se réunissent de façon informelle avec leurs collègues pour échanger puis partager leurs trouvailles et leurs découvertes inspirantes. Tous les sujets touchant de près ou de loin les bibliothèques, les bibliothécaires et la culture sont abordés. Nous allons publier les résultats de cette veille collaborative chaque semaine pour en faire profiter un public plus large. Bienvenue à tou.te.s !

N’hésitez pas non plus à partager vos propres découvertes avec nous et vos collègues. Bonne lecture !
  • Amendes et frais en bibliothèques : Un survol des  différents frais payés en bibliothèques aux État-Unis et une réflexion sur leur élimination ou remplacement. (Jean-Philippe Décarie)
  • Lancer son Repair café : Guide complet : Un guide pratique pour créer un événement de type « repair café ». Contexte suisse donc les budgets, les liens et organismes à contacter le sont aussi, mais c’est un outil intéressant pour se lancer. (Gaëlle Bergougnoux)
avr - 2017 02

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 Par Jérémy Kergourlay — Travail personnel, CC BY-SA 4.0

Chaque semaine, des professionnel.le.s des bibliothèques de Montréal se réunissent de façon informelle avec leurs collègues pour échanger puis partager leurs trouvailles et leurs découvertes inspirantes. Tous les sujets touchant de près ou de loin les bibliothèques, les bibliothécaires et la culture sont abordés. Nous allons publier les résultats de cette veille collaborative chaque semaine pour en faire profiter un public plus large. Bienvenue à tou.te.s !

N’hésitez pas non plus à partager vos propres découvertes avec nous et vos collègues. Bonne lecture !
  • Étudier en pédalant. On peut étudier debout ou en pédalant dans trois bibliothèques de l’Université de Montréal. grâce à des postes de travail actifs qui y sont installés dans le cadre d’une étude en kinésiologie. (Marie D. Martel)
  • Une travailleuse sociale en bibliothèque pour itinérants. Dans la bibliothèque de Hennepin, une travailleuse sociale est engagée à temps plein pour accueillir et accompagner les itinérants. (Marie D. Martel).  Dans le même ordre d’idée, quel sera l’impact sur les personnes en situation d’itinérance qui  fréquentent une bibliothèque lorsque cette dernière ferme pour des rénovations ?  Le cas de la bibliothèque Martin LutherKing Jr à Washington.
mar - 2017 26

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 aurelie ghalim via Flickr (CC BY-SA 2.0)

Chaque semaine, des professionnel.le.s des bibliothèques de Montréal se réunissent de façon informelle avec leurs collègues pour échanger puis partager leurs trouvailles et leurs découvertes inspirantes. Tous les sujets touchant de près ou de loin les bibliothèques, les bibliothécaires et la culture sont abordés. Nous allons publier les résultats de cette veille collaborative chaque semaine pour en faire profiter un public plus large. Bienvenue à tou.te.s !
N’hésitez pas non plus à partager vos propres découvertes avec nous et vos collègues. Bonne lecture !
  • Vie privée et bibliothèques : enjeux et bonnes pratiques.  La question de la protection de la vie privée se pose de plus en plus avec la multiplication des outils numériques et en ligne.   Les questions et les bonnes pratiques de base demeurent les mêmes malgré que les contextes législatifs diffèrent.
  •  Des bibliothèques sans personnel ?  Un projet pilote des bibliothèques de Toronto pour remédier aux courtes heures d’ouverture de deux succursales soulève des questions.   Ce modèle de bibliothèque accessible par les usagers existe ailleurs, notamment en Scandinavie.
  • Envie de planifier un makerspace ? Quelques conseils destinés à ceux qui voudraient se lancer dans ce projet dans une milieu scolaire (mais facilement adaptable pour les bibliothèques).   Une fois l’espace planifié, vous pourrez lire la suite pour la mise en oeuvre.
  • Publics empêchés : Lever les obstacles. Un dossier complet sur les obstacles qui entravent l’accès des publics à la bibliothèque et l’exploration des pistes pour favoriser l’inclusion auprès des seniors, jeunes, personnes handicapées ou analphabètes, etc.

 

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